Dans la cour devant l’école, il y a une structure de jeu en plastique de toutes les couleurs, avec un toboggan et un petit tuyau, où l’on peut se cacher si on est fin comme un ver de terre de trois ans. Ce matin, à la récré j’étais debout, avec une enfant accrochée à chaque bras. Un peu bloquée, je regardais ce qui se passait et j’essayais de voir qui poussait des cris stridents depuis un moment. Lola. C’est souvent elle qui envoie des ultrasons. Je l’ai regardée un moment, de loin. Assise sur le rebord de la fenêtre en plastique jaune, elle se laissait tomber en arrière, puis par terre, main sur le front, inerte. Blanche-neige, mais sans la pomme. Je me suis approchée et j’ai demandé à quoi ils jouaient.
« On joue à la mort. »
Elle meurt. Sohan arrive en vélo. Il lui fait un massage cardiaque et un baiser sur le front. Il repart un peu gêné. Elle se réveille, se relève, se rassoit sur la fenêtre en plastique, prête à mourir. Il est déjà sur la colline en bitume du bout de la cour. Elle hurle, il l’entend et s’élance du haut de la montagne. Il dévale la pente à toute vitesse, évite de justesse la maitresse qui donne la main à deux petites. Dérapage, il jette son vélo. Lola git sur le sol. Elle est morte, il lui reste quelques minutes pour la réanimer, un massage, un bisou, hop, il renfourche son vélo et fonce en haut de la colline.
La récré passe vite, on n’a qu’une seule vie et la maîtresse va bientôt taper dans les mains.