« Vas-y, c’matin j’ai parlé avec un bénévole pendant au moins deux heures, là. C’té gavé intéressant! Le mec, il est au taquet des restaurants du cœur, j’te dis. Il m’a tout expliqué le gars, il est trop puissant ». Et aussi étrange que cela puisse paraître, c’est une jeune fille beaucoup trop maquillée, semblant sortir de la fashion-week qui a dit ça. J’étais assise dans le tram et je regardais les collégiens parce que cette semaine, c’est la semaine de stage des élèves de troisième, la fameuse découverte du monde professionnel. Un mois qu’ils se stressent à se demander s’ils vont trouver une place. D’un côté de la rame, il y avait les filles et leurs cheveux et leurs portables, qui essayaient de masquer leur enthousiasme en racontant d’un ton faussement blasé leur matinée. Et puis les garçons, de l’autre côté, avec leurs cheveux et leurs portables, qui ne parlaient pas. Et quand la porte du tram s’est refermée et qu’ils sont sortis, je les ai entendus se hurler dessus en rigolant avec leurs voix qui muent: « Allez-là, vas-y chômeur, on s’en fout trop de l’épopée de ta vie ».