Pronoms très personnels

Les enfants, ils ne viennent pas tous très régulièrement à l’école. On pourrait faire des livres entiers sur les excuses. D’ailleurs certains l’ont fait. Parfois les parents n’ont pas le choix…parfois si. Enfin, on a l’impression, peut-être qu’on se trompe. En tout cas, les enfants, certains, ça leur manque l’école. Cassidy, elle a raté la classe hier. C’est une petite timide. Quand elle parle, elle regarde toujours par terre et elle bégaye un peu. Mais quand elle regarde dans les yeux, ça se voit qu’elle adore venir à l’école. Elle a fait des progrès incroyables depuis la rentrée. Ce matin, dès qu’elle est arrivée, elle m’a dit: « Maîtresse on a fait quoi hier? » Ce « on », alors qu’elle n’était même pas là, il n’existe même pas dans la grammaire. Parce que grammaire et émotions, ça se conjugue pas. Enfin pas au début…

J’ai bien vu que Cassidy, ça l’embêtait fort, d’avoir loupé un jour. Alors je lui ai demandé si elle voulait que je lui donne la feuille pour la maison. Oui. Ça tombait bien, c’était un exercice qu’on fait souvent ensemble: des petites images à découper et à coller en fonction de ce qu’on entend, dans le cahier de brouillon. Alors j’ai donné la feuille et elle m’a dit: « Mais j’aura pas de colle, et pas de de ciseau aussi ». Parce qu’il y a des parents qui se saignent pour que leurs enfants aient tout dans la classe. Et à la maison, y a pas grand chose. Pour une fois, j’ai autorisé ce que j’interdis d’habitude…elle a ramené sa trousse à la maison, et ses ciseaux aussi.

Il y a comme une sorte de règle grammaticale qu’on se lance à la tête entre spécialistes: « on est un con ». Lorsqu’on l’emploie à la place de « nous ». Dans la vraie vie, c’est bien plus simple que ça…